Couleurs d'Usine ---------------- de Pierre Béarn Au déboulé garçon pointe ton numéro Pour gagner ainsi le salaire D'un énorme jour utilitaire Métro, boulot, bistrot, mégots, dodo, zéro. Je veux rester libre de vivre À la lumière de mon coeur Seul s'il le faut Et les mains vides Rêvant à l'Humanité sauvée des langages. Je souffre en ma santé de n'être que poussière, La vie flétrie de l'ombre irrite mon tourment, Je voudrais apporter aux hommes la lumière! Je rêve de crisper sur la laideur mes mains Pour accoucher la nuit de ses giclées de monstres Et réveiller le Dieu qui manque à son Destin. Mais que peut le poète éjecté du troupeau Semblable à la clarté fuyante d'un orage Et qui zèbre la nuit sans arracher sa peau? Sur le monde avili si je posais mes mains Pour accoucher la nuit de ses giclées de monstres J'enfanterais un Dieu privé de son Destin. Que dansent le Mépris, la Haine, la Vengeance! Flammes du feu malsain cernez mon incendie! Le sacrifice est vain puisque tout recommence. Je souffre en ma santé des maladies humaines, Du refus d'un miracle à l'ombre de mes mains, De n'être en ce bourbier que peine entre les peines.