Il est grand temps que j'en parle, c'est après tout mon manga favori, indétrônable depuis cinq ou six ans. Et avec la quantité de ce que je lis et regarde, il en faut beaucoup pour garder une première place incontestée. Alors, pour une fois, je vais parler tant de l'animé que du manga parce que chacun a des qualités propres. Ce n'est pas vraiment une histoire, chaque épisode/chapitre commence plus ou moins au même point de départ. Certains présentent un nouveau personnage, d'autres sont scénaristiquement l'un à la suite de l'autre, mais la plupart sont juste ce genre de petite histoire indépendante et oubliable. Le grand avantage c'est de pouvoir regarder n'importe quel épisode au hasard et s'y retrouver si l'on connait déjà les personnages. Les personnages sont étonnamment un autre point fort de ce manga, bien que n'ayant qu'un ou au mieux deux traits de caractères. Cela fait fort penser à la Comedia del Arte : des personnages caricaturaux dont les interactions sont extrêmes et comiques sont utilisés pour une critique de la société. Chaque personnage à un petit descriptif d'une seule ligne qu'il pousse généralement jusque dans le comique. Et chaque personnage a son épisode de présentation qui se moque de son trait principal. Le héros, Nozomu Itoshiki, éponyme professeur Désespoir, est le professeur principal d'une classe d'adolescents, son trait particulier est de tout voir négativement et d'en être constamment désespéré, à deux doigts du suicide. Dans l'animé il est doublé par le légendaire Hiroshi Kamiya ce qui pourrait largement suffire à ce que l'adaptation vaille la peine, en soi. Qui plus est, les génériques sont chantés par les doubleurs des personnages, dont lui. L'histoire commence par sa rencontre qui n'aurait jamais dû se produire, avec une fille étrange qui dénie l'existence même du négatif et ne peut voir la vie que du bon côté, Franz Kafka. Sans rire, son nom est Fuura Kafuka, qui n'est qu'une japanisation du nom de ce célèbre auteur. Et c'est bien sûr un pseudonyme. Car elle est le grand mystère de cet univers. Qui est-elle ? D'où vient-elle ? Quel est son vrai nom ? Pourquoi ce pseudonyme ? Pourquoi personne ne trouve ça étrange ? Pourquoi est-elle si étrange ? Comment apparaît-elle constamment de nulle part ? Tant de questions dont vous n'aurez pour la plupart la réponse qu'à la toute fin, et d'autres encore dont la réponse n'est jamais explicite. Chaque chapitre commence par une mise en situation suivi d'une courte analyse de la société. Le professeur est désespéré, beaucoup d'exemples désespérants sont donnés, parfois sous couvert d'une métaphore. Puis Fuura sort de nulle part, donne des contre-exemples positifs et amorce le gag qui terminera le chapitre. Ce même schéma est répété plus ou moins 300 fois en y ajoutant des variations diverses et variées. L'animé y ajoute ses propres variations, comme subitement changer les doubleurs, utiliser une animation devenue iconique du désespoir du professeur, cacher sur tous les tableaux noirs des blagues et des références pour ceux qui auront la patience de regarder image par image, engager une doubleuse pour un personnage qui ne parle pas,... Malgré tout, c'est malheureusement très méconnu. C'est ce que je considère comme une pépite de culture et pourtant c'est relégué aux oubliettes. Allez jeter un œil, vous ne perdrez pas une seconde de votre temps.